L'Unité source de Paix


Lettre d’information n°1439 du Samedi 8 Octobre 2005


L'unité des Chrétiens fera le salut du Monde.


      C'est ce thème qui fut à l'origine de ma découverte de l'Eglise, peu avant la deuxième guerre mondiale. Cette proclamation, ainsi que d'autres aux thèmes aussi percutants, nous les diffusions à l'adresse du grand public par des collages d'affiches, des tracts et surtout des réunions, lesquelles rassemblaient des auditoires de tous milieux: chrétiens, libres penseurs, syndicalistes, camelots du roi, communistes. Bien sûr, ces modes d'expression qui entendaient proposer le Message du Christ et la Mission de l'Eglise universelle à l'opinion de la rue, n'avaient pas l'impact que l'initiative du mouvement "San Egidio" rencontre aujourd'hui. "La réunion Lyonnaise", s'inscrivant dans le contexte d'un ébranlement religieux mondial provoqué par la mort du grand et charismatique pape que fut Jean-Paul II et l'élection rapide de Benoit XVI, fut plus qu'un succès: un événement.


     Pendant ces jours privilégiés, Lyon fut en quelque sorte la capitale "d'un continent nouveau", celui de la paix dans le monde, de l'unité, du dialogue. On est loin -qui pourrait le regretter ? - du temps où ce genre de rassemblement était taxé de "rassemblement à la mysticité confuse". Aussi sommes-nous heureux de joindre à nos applaudissements sans réserve aucune, notre modeste participation de chrétiens - catholiques au dialogue.


     C'est quoi un tel dialogue ? La réponse est délicate car il s'agit, au cours des débats et des tables rondes groupant des gens aussi divers qu'honnêtes, de confronter des opinions différentes, voire opposées. Jamais en effet, on n'avait tant parlé d'unité, censée être source de paix. Mais, ce qui à Lyon était positif par la qualité de participants compétents et enthousiastes, court le risque de s'enliser lorsque le dialogue se généralise en différents milieux. Car une telle entreprise exige de la part des participants de base une formation adéquate qui fait souvent défaut. De plus, le cadre du dialogue et les sujets traités doivent être bien définis. Ainsi, on parle d'unité, fort bien, mais de quelle unité s'agit-il ? Il ne s'agit pas d'union mais bien d'unité. Il faut donc que les catholiques, artisans de ce dialogue, soient à l'unisson dans leurs propositions, dans la vision qu'ils ont de l'Eglise Catholique. Pour découvrir l'autre, il faut être soi-même, pour un catholique être soi-même c'est vivre pleinement en Eglise, partager la vision grandiose que présente l'Ecriture, de la Jérusalem céleste descendant du ciel pour prendre possession de l'Histoire. L'Eglise c'est le fait historique de la création par Dieu, de toutes choses, couronnée par la création de l'homme, et le refus du premier couple à l'écoute du Malin, d'où la Chute. Mais aussi la promesse de Dieu créateur qu'un Sauveur viendrait ici-bas rétablir l'unité rompue aux premiers jours de l'humanité. Cette promesse, le peuple de l'Élection l'a drainée tout au long de l'histoire par la voix des Prophètes. Aussi la venue du Sauveur, fils de Dieu, sur la terre est l'événement central de l'histoire de l'humanité. Jésus est le libérateur et de l'homme et de l'histoire. Offrir ce trésor donne au baptisé un grand souffle, porteur d'une tension vers l'avenir. Dialoguer c'est aussi, par la prière, demander à Dieu la grâce de vivre l'esprit d'enfance au sens évangélique du terme, quelque chose comme un état de l'homme réceptif primitif. L'unité est un but mais, à l'origine, il y a une plénitude séminale, une unité originelle dans l'indifférenciation. Mais quelle que soit la forme de l'unité finale, qu'on peut nommer organique, elle ne sera réalisée qu'en vertu d'une unité préalable primitive. Bien sûr, le commencement ainsi évoqué suppose la fin de l'histoire annoncée par le Christ. C'est notre espérance laquelle est certitude et non un espoir incertain. Cette espérance c'est la Parousie, l'essentiel du Christianisme, c'est un événement final qui fera irruption et par lequel le Christ, sans rien briser, sans rien détruire de ce qui aura été préparé, transposera, transfigurera et renouvellera toute chose: la nouveauté éclatante du final. Cette Unité doit être proclamée avec l'enthousiasme que provoque sa découverte et annoncée par des hommes libres, vivants de la vérité apportée par le Christ. L'homme libre, ne fait qu'un avec cette vision de l'Unité. Une lecture attentive de Saint Thomas d'Aquin laisse entrevoir un humanisme existentiel; la liberté de la personne et de la société s'enracinant dans le lien existentiel avec Dieu qui fonde la nature de l'homme. Autrement dit, restituer l'homme à Dieu est la condition de la vraie liberté. Plus l'homme est esclave de Dieu, plus il est libre. Le Monde n'a pas à craindre un "totalitarisme" de l'Eglise.


     C'est dans ce contexte bouillonnant d'unité et de paix que paraît le "Compendium du Catéchisme de l'Eglise catholique". Nous retrouvons dans ce texte, présenté par le pape Benoit XVI, des définitions qui font difficulté dans certains milieux. L'association des chrétiens homosexuels en juge le contenu "inadmissible". Un langage qu'on croyait dépassé depuis le concile Vatican II, ajoute un grand magazine. Certains passages peuvent -parait-il- exaspérer les protestants, enfin comme le susurre "un grand journal du soir": "on se trouve brusquement ramené dans le passé, comme lorsqu'on feuillette les pages d'un vieux missel d'où s'échappent des images pieuses". Que dit donc, en très résumé, ce catéchisme qui paraît opportunément ? La nouvelle publication romaine se préoccupe des questions de morale privée: la contraception est interdite, l'insémination artificielle est immorale... les péchés graves sont dénoncés: l'adultère, la masturbation, la fornication, la pornographie, la prostitution, le viol... Mais ce qui provoque surtout la réprobation, c'est le contenu évoqué dans cet éditorial au sujet de l'Eglise: Où subsiste l'Unique Eglise du Christ ? (question 162): Comme société constituée et organisée dans le monde, l'Unique Eglise du Christ subsiste dans l'Eglise Catholique. La question (182) traite du Pape: "Il est le Vicaire du Christ, la tête du collège des Evêques, et le pasteur de toute l'Eglise, sur laquelle il a, par institution divine, un pouvoir plénier, suprême, immédiat et universel".
On comprend -ne serait-ce que par ce rappel de la doctrine- que l'Eglise Catholique soit attaquée, quelle que soit sa position réputée en avance ou en recul. Jusqu'à la consommation des siècles il en sera ainsi. C'est pourtant avec tout cet héritage, et la conscience déclarée et avouée de cet héritage, que le catholique cherche le dialogue avec qui l'accepte, conscient que cette apparente intransigeance est dans sa réalité porteuse d'ouverture. Là se situe le Paradoxe. Paradoxe vécu par le dialogue. Non seulement le catholique ne renie rien, mais il doit découvrir à l'autre sa propre richesse, cet unique nécessaire qui recèle la splendeur de la Vérité (Veritatis splendor). Reste le langage, la manière de parler, la joie exprimée de découvrir les valeurs de l'autre, souhaitant que l'autre ait la même disposition de compréhension, sans quoi le dialogue risque d'être stérile. Il ne faut pas se cacher que la tâche est lourde; on a souvent tort par la manière d'avoir raison. Il faut faire preuve dans une telle rencontre, de toutes les vertus enseignées par notre Eglise. La prière, l'humilité, la patience. Et surtout le désir sincère d'Amour du prochain, base de la paix du coeur préludant à celle des nations. Annoncer le Retour du Seigneur est une proposition exaltante; il n'est pas question d'une attente passive mais au contraire d'une attente toute tendue vers le service des frères, des pauvres, des persécutés, des affligés. Ce service est indispensable, il est le soutien temporel qui donne toute sa puissance à la mission prophétique de l'Eglise.


     La Paix totale ne peut être bâtie que sur le Roc de la certitude. La route sera longue peut-être, mais la mission du Chrétien pour hâter le Retour glorieux du Christ est de mettre le feu sur la terre, et tout baptisé est une braise, alors le dialogue passera à la lumière, il sera Unité et Paix.


Marana Tha.


Georges Sauge.

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